MYSTÈRE AU MINISTÈRE DE LA GUERRE

Le matin du mercredi 04 avril 1913, à 7 heures 37 précises, Mr Félicien DURANCHON, fonctionnaire 2ème catégorie au ministère de la guerre, chargé de l'approvisionnement de la nourriture des chevaux pour la région Est, sort de son domicile de Paris 5 rue de la Pompe, pour se rendre à son bureau.
Il est à un quart d'heure de son travail qui débute à 8 heures précises. Son chef de service, Mr Auguste LAPETOIRE sous chef du service approvisionnement de la nourriture des chevaux pour la région Est, est très strict sur les horaires. Il ne souffre d'aucune espèce de retard de la part de ses subalternes.
Auguste LAPETOIRE est un ancien de la guerre de 70 (1870) au cours de laquelle il a perdu un œil. Il demande à ses exécutants de la rigueur dans la tenue des dossiers. Ainsi qu'il aime à le dire «Messieurs, de la rigueur dans la rigueur!»

Félicien DURANCHON, célibataire, a fêté ses 50 ans lundi dernier, il est du 02 avril. Ce jour là, il s'était autorisé un écart à sa vie réglée comme du papier à musique. Son anniversaire tombant un mercredi, il avait sorti sa bouteille de porto dominical pour s'autoriser un demi verre au repas du soir. Verre qu'il avait siroté seul.
Félicien DURANCHON n'ayant aucun ami.

Ce même matin du 04 avril 1913, même heure, Melle Félicie LAFLEUR, vendeuse aux Galeries Nouvelles, 45 ans, célibataire, quitte son domicile de Paris 56 rue de la Fosse pour rejoindre une amie rue de la Ventouse.
Melle LAFLEUR ne travaille pas aujourd'hui, le magasin étant fermé ce jour pour cause de travaux.

L'amie de Melle LAFLEUR se nomme Germaine LAFOND, 45 ans, c'est une ancienne copine d'école. Elle se sont connues en 1876, quand elles avaient 8 ans à l'école de la rue de l'abreuvoir.
Depuis elles ne se sont jamais perdues de vue.

Quand Melle LAFLEUR traversa la rue de la fosse, elle remarqua la présence inhabituelle d'un homme d'une cinquantaine d'année, portant costume et sacoche, se dirigeant d'un pas assuré vers la rue Chambon.

Sa curiosité aiguisée, et ayant du temps libre, Félicie LAFLEUR décida de suivre discrètement l'inconnu.

A 8heures 05, Mr Auguste LAPETOIRE, constatant que Félicien DURANCHON n'était pas à son poste de travail, interrogea ses collègues pour savoir si DURANCHON avait été vu.
A 8 heures 15, le sous chef du service approvisionnement informe le chef du service approvisionnement de l'absence injustifiée de Félicien DURANCHON et fait un rapport.

A 10 heures, Félicie LAFLEUR arrive chez son amie. Elles passeront la journée ensemble jusqu'à 16 Heures.

Le lendemain Mr Félicien DURANCHON ne s'est toujours pas présenté au travail. Son chef de service envoie chez lui une estafette du ministère de la guerre.

Le fonctionnaire 2ème catégorie au ministère de la guerre, chargé de l'approvisionnement de la nourriture des chevaux pour la région Est n'est pas chez lui et reste introuvable.

Le même jour à 8 heures, comme tous les matins, Melle LAFLEUR Félicie, vendeuse aux Galeries Nouvelles, sort de son domicile pour rejoindre son travail.

Deux mois plus tard, un véhicule de déménagement vide un appartement 5 rue de la Pompe. Une pancarte sur la porte de l'immeuble indique :
» A LOUER appartement une chambre. Libre immédiatement. S'adresser à la concierge»

Au même moment, au ministère de la guerre, Auguste LAPETOIRE solde le dossier de Félicien DURANCHON.
Il n'a eu depuis aucune explication à cette disparition mystérieuse. Il en a bien parlé à son chef, mais ce dernier n'a pas semblé intéressé par le sort d'un employé 2ème catégorie.

  • Après tout, s'était-il exclamé, il a peut-être trouvé l'amour !

Ce même jour, à l'ambassade d'Allemagne à Paris, les conseillers sont en pleine réunion :

  • Qu'est-ce qu'on en fait du bonhomme ? Ça fait 2 mois qu'il est là.

  • Ils ont été quand même nuls. Se tromper d'individu à ce point c'est quand même grave ! De toute façon il ne nous est d'aucune utilité.

  • Oui, mais maintenant le mal est fait, il faut trouver une solution.
    Si on le libère, il ira tout raconter, et là je t'explique pas les conséquences.

  • On va quand même pas le liquider !

5 mois plus tard à la gare de Deauville, comme tous les jours depuis quelques mois, un homme d'une cinquantaine d'année, sirote un porto à la terrasse du café du rail.
Derrière sa petite moustache et ses lorgnons de bureaucrate pointe un sourire.
Le soleil de Normandie lui chauffe les épaules. Il est bien.
Il se demande ce qu'il va faire aujourd'hui : se promener le long de la plage ou rester à son appartement à regarder du balcon les gens qui partent au travail.
Doit-il rester en Normandie ? On lui a dit que dans le Sud de la France le climat était meilleur.
Pourquoi pas, il verra ça plus tard. Rien ne presse, il est bien.
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Pendant ce temps au ministère de la guerre, Auguste LAPETOIRE lit son journal.
Un article attire son regard :
«Lundi 02 avril 1913, au kiosque de la rue de la Muette, un inconnu a acheté le ticket gagnant de la Loterie de la Patrie.
D'après la direction de la loterie, le gagnant serait passé retirer son gain le mercredi de la même semaine soit le 04 avril.
L'organisme gérant le jeu n'a pas donné d'information sur l'identité de l'heureux gagnant du million de Francs »

  • Moi qui joue toutes les semaines. C'est pas à un employé du ministère de la guerre que ça arriverait une telle chance, pensa Auguste LAPETOIRE sous chef du service approvisionnement de la nourriture des chevaux pour la région Est.

F I N

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