L'Allégorie de la Caverne, Platon (La république LVII)

Première étape : le monde de la caverne

"Imaginez , dit Socrate, des prisonniers dans une caverne souterraine, qui ont derrière eux un feu, et sont attachés d'une façon telle qu'ils ne puissent voir sur le mur d'en face, que les ombres de marionnettes manipulées au-dessus d'un mur situé dans leur dos".

Ils pensent qu'il n'y a rien d'autre à voir, que ces ombres sont réelles, car ils ont toujours connu ce monde. Ils ne sont pas malheureux.

Ces prisonniers sont "semblables à nous", dit Socrate. La Caverne n'est pas l'état dégradé d'une société mauvaise. C'est la condition humaine. Même dans une société juste, nous commençons tous dans la Caverne.

Les ombres sur le mur de la caverne sont nos opinions et nos préjugés, fondés sur notre expérience sensible et sur la force de l'habitude (représentés dans l'Allégorie par les chaînes qui entravent les prisonniers)

Deuxième étape : la libération

On les libère de ses liens un prisonnier et on le force à se retourner vers la lumière du feu et vers les marionnettes dont les ombres se projettent sur le mur de la caverne. On force ensuite ce prisonnier à sortir de la caverne.

Le prisonnier qui n'était pas malheureux de son sort, qui n'avait pas connu autre chose que la pénombre de la caverne, ne comprend pas ce qui lui arrive, d'autant moins que ce "retournement" est douloureux et pénible. Ses yeux n'étant pas habitués à contempler autre chose que l'obscurité, il est ébloui et aveuglé par la moindre source de lumière. Cependant lorsque ces yeux se seront habitués et qu'il pourra distinguer les formes des marionnettes, il n'aura pas plus de repères, il saura pas plus ce qui est réel, si ce sont les ombres de la caverne ou ces objets qui se présentent désormais à lui.

Sans repères, le prisonnier sera en proie à la confusion. Il s'emportera même contre quiconque chercherait à lui dire combien sa situation initiale était pitoyable. Il souhaitera d'ailleurs pouvoir y revenir.

De la même façon, une fois arrivé à la surface et à la lumière du jour, il sera tout d'abord éblouis et ne pourra supporter de voir les objets réels qu'au moyen de leurs reflets dans l'eau ou sur une surface opaque et polie, et de façon indirecte.

Ce n'est qu'ensuite au terme d'un long apprentissage, une fois que ses yeux se seront accoutumés à la luminosité, qu'il pourra regarder ces objets directement, sous la lumière du soleil et pourra même tourner son regard vers le soleil lui-même.

Le retour dans la caverne

Il faut se souvenir ici que pour Platon, le but de la connaissance n'est pas la connaissance en elle-même mais la justice et le bonheur qu'elle procure concrètement.Tel est le sens de l'activité philosophique.

Cette connaissance à laquelle accède le philosophe n'a de sens que si celui-ci peut la partager avec les autres hommes et la mettre en pratique dans la Caverne. Une fois que le philosophe aura terminé sa formation et sera parvenu à la contemplation du Vrai, il retournera donc dans la caverne pour expliquer aux hommes que leur monde est un monde d'illusions et de mensonges, un monde dans lequel le bonheur auquel ils croient accéder n'est lui aussi qu'une illusion destinée à les maintenir enchaînés.

Une telle révélation sera insupportable aux hommes de la caverne qui dans le meilleur des cas le traiteront comme un fou ou un original et refuseront de le croire, et dans le pire des cas le mettront à mort.

Interprétation de l'Allégorie

• Dans ce texte Platon expose le pouvoir libérateur de la phisophie, comme pensée abstraite, qui conduit à la connaissance et au discernement.

L'homme qui se met à penser y est décrit comme celui qui rompt avec les liens de la conformité à l'expérience ordinaire et à l'opinion reçue.

La progression vers l'état éclairé (vers la vérité) y est décrite comme un voyage de l'obscurité vers la lumière. Après avoir été délivré de ses liens, celui qui remonte péniblement de la Caverne vers la surface doit fournir un effort maximal qui n'est pas sans douleur. Ce voyage prend la forme d'une conversion de l'individu dans tout son être, une conversion qu'il éprouve dans son corps et qui le transforme en profondeur. En effet, celui qui se met à faire usage de son esprit, fait quelque chose pour lui-mêmes. Il prend soin de lui-même (ce qui est une des maximes socratiques : "Prends soin de toi").

• En parallèle, Platon dresse un tableau très pessimiste de ceux qui ne sont pas éclairés par la philosophie. Impuissants et passifs, ils sont manipulés par d'autres (les marionnettistes). Bien pire, ils sont habitués à cet état et ils l'aiment ( link), résistant à tout effort qui viserait à les en libérer. Leur satisfaction est une sorte de conscience aveugle de leur état car ils ne peuvent même pas reconnaître la vérité de leur condition pour y réagir.

Plus visionnaire que Black Mirror, Platon nous enseigne la télévision avant même que l'image virtuelle n'ait vu le jour, il fallait être libre à l'extrême pour pouvoir prétendre à de telles théories.

Platon

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