Quelques nouvelles d'un physicien des particules et enseignant traversant la pandémie

This post is a French adaptation of this one, in which I give an update about what my life was during the last 18 months.

Me voilà ! Après une absence de près d’un an et demi, j’arrive enfin à respirer un peu malgré mon agenda hyper chargé. J’ai pu ainsi trouver 5 minutes (enfin quelques heures) pour donner quelques nouvelles.

Tout a changé pour moi en février 2020. A ce moment, je suis revenu en France après avoir organisé une conférence assez intense en Corée, exactement la veille du jour où les vols vers l’Asie ont cessé en réaction à la pandémie qui commençait. Je suis (plus ou moins naturellement) devenu très occupé de par ma profession, et ainsi mon activité sur Hive a chuté (on pourrait même plutôt dire qu’elle s’est annihilée). Tout comme pour quasi toute activité ayant trait aux loisirs. Les jours font en effet 24h, les semaines 7 jours, et on est coincé avec ça. Pour faire une blague de physicien pourrie, j’ai même essayé de devenir relativiste (et me déplacer très très vite), afin de profiter de la dilatation du temps, mais sans succès.

Bref, me revoilà (oui je sais je l’ai déjà dit). En ce jour, il est difficile de dire si ce post est le premier d’une nouvelle série régulière, ou une simple tentative de reconnection à Hive vouée à l’échec. De façon idéale, j’aimerais poster un article en anglais traitant de physique le lundi, et son adaptation française le jeudi suivant. La vie est cependant loin d’être idéale… Donc on verra ce qui va se passer. Surprise surprise…

Pour ceux qui avaient l’habitude de me suivre dans le monde d’avant, je préviens : ce post sera un peu différent, car plus personnel.


[Crédits: CERN]


A l’université durant une pandémie


Avec l’ascension du COVID, la vie académique a changé assez drastiquement. Nous avons du adapter non seulement notre façon d’enseigner, mais aussi notre façon de gérer les cours, les examens, etc.

Pour la petite histoire, nous suivions depuis Paris le rythme imprévisible des décisions gouvernementales, dont nous étions mis au courant la veille au soir devant notre poste de télévision. Cela a rendu notre boulot assez épuisant dans le sens où nous ne pouvions jamais rien anticiper. A la fois concernant mes cours et mes tâches de gestion, il a fallu faire et défaire différentes choses de façon constante tout au long de l’année. Evitons de parler d’heures supplémentaires (qui ne sont pas payées) ou de flot d’e-mails (on a dépassé des records). Les chiffres sont juste… inhumains. Fin juillet 2021, j’étais dans un état de fatigue énorme et les 3 semaines de vacances que j’ai prises ensuite (sous la pluie n’est-ce pas… l’été en France a été pourri) ont à peine suffit à partiellement me remettre sur pieds.

Il y a quand même eu du bon en 2020-2021. On a pu tester des nouvelles méthodes d’enseignement et d’apprentissage. Vu que l’on passait sa journée sur Zoom, on n’a en fait pas eu le choix. Je dois avouer qu’enseigner devant plusieurs dizaines de carrés noirs ne me manque pas… Espérons qu’Omicron ne nous y ramène pas… Personnellement, voir la tête de mes étudiants est primordial (même s’ils sont masqués). Cela permet d’avoir un retour sur le cours, en live, et de s’adapter le cas échéant. Bien sûr, tout ça est impossible sur Zoom.

De façon plus pratique, j’ai testé ce qui s’appelle le cours inversé. Avec une collègue, nous avons créé un matériel de cours (pour le sujet de ce cours, il peut se deviner à partir de l’image ci-dessous) bien plus conséquent que d’habitude, contenant moult anecdotes et faits intéressants allant au-delà du cours. L’espoir a été de rendre la lecture du cours assez attractive pour les étudiants, pour qu’ils le fassent par eux-mêmes, de leur côté. Ensuite, on utilisait les créneaux de cours pour répondre aux questions, faire des exercices, des tutoriels amusant demandant de l’imagination et du raisonnement logique, etc. Après coup, je ne regrette absolument pas cet essai, que je referai (en présentiel je l’espère) cette année à partir de janvier.


[Crédits: Rob_de_Roy (Pixabay)]

De plus, afin de pouvoir suivre du mieux possible nos étudiants, Discord est venu à notre rescousse. Un serveur dédié et des enseignants disponibles 24h/24 et 7j/7, et le tour fut joué. Les retours étudiants furent très positifs, et ces derniers étaient en fait plutôt contents de notre façon de faire et de notre disponibilité. On s’adapte n’est-ce pas ?

Le prix à payer (les repas gratuits, ça n’existe pas) fut un état de quasi burn-out à la fin de l’année académique. Créer des centaines de pages de cours, mises en ligne par dizaines souvent seulement une semaine à l’avance (et oui tout ça n’était pas prévu), et bien ça crève. Surtout lorsque l’on ajoute la partie “école à la maison pour mes deux petits” !

Mais je n’ai pas encore écrit à propos du pire. Les tâches administratives. Ces dernières ont explosé en terme d’investissement temporel. Il a fallu tout gérer, et surtout les mauvaises décisions venant d’en haut (et donc hors de notre contrôle). Je fus également témoin d’une chose terrible : la détresse étudiante. Discuter avec des étudiants et se demander s’il faut appeler le SAMU, ça m’est arrivé. Essayer de donner des conseils alors que ma formation en psychologie appliquée est tout simplement inexistante, ça c’est fait aussi. Et ainsi de suite. Au final, on a fait du mieux qu’on a pu, et les étudiants à qui nous avons parlé se sont montrés plutôt satisfaits de notre soutien. Mais plus jamais ça par pitié (malheureusement, ça continue et c’est loin d’être fini).

Tout cela a contribué à la fatigue ambiante qui fut la mienne… oui je sais je l’ai déjà dit quatre fois. Pour la première fois en près de 20 ans de carrière, mon corps était en train de me lâcher. C’est une sensation étrange lorsque l’on se rend compte que ça arrive, et que l’on n’y peut rien.


La recherche scientifique, encore et encore et encore


A côté de ces tâches liées à l’enseignement, j’ai essayé de maintenir une activité de recherche digne de ce nom, et ce sur tous les sujets qui m’intéressent. Pour ceux qui étaient sur Hive et me lisaient dans le monde d’avant, ce sont exactement les sujets sur lesquels j’écrivais. Pour les autres, je dirai simplement que mon travail de recherche peut se décliner en trois catégories.


[Crédits: Smithsonian Institution (domaine public)]

  1. Les phénomènes nouveaux aux collisionneurs de particules comme le LHC au CERN ou n’importe lequel de ses successeurs potentiels. Ici, l’idée est d’étudier comment des nouveaux phénomènes pourraient déjà être présents dans les données (en ré-interprétant ces dernières) et de s’assurer que toutes les possibilités en matière d’inattendu soient considérées (via des analyses dédiées sur base de simulations).
  2. La matière sombre, qui correspond à l’intersection de la cosmologie et de la physique des particules. Bien que la matière sombre ait un impact important sur la vision actuelle du fonctionnement de l’univers, elle échappe toujours à une détection directe sur Terre. De plus, il n’y a pas de particule connue qui pourrait remplir son rôle. Par conséquent, nous avons un travail immense consistant à tester les différentes options, au vu des données actuelles.
  3. Le développement d’outils et de méthodes numériques pour les calculs de physique des hautes énergies. Le but est ici de concevoir des techniques permettant d’effectuer des simulations de façon assez automatisée et simple sur un ordinateur tel que ceux qui peuvent être achetés dans le commerce (et le tout sans nécessairement comprendre la théorie quantique des champs ou avoir de solides connaissances en physique des particules).

Je pourrais discuter tous les sujets ci-dessus de façon plus détaillée, durant en fait des posts et des posts. Mais je préfère garder cela pour le futur, en espérant que celui-ci soit sur Hive (j’y crois !). Comme déjà dit, on verra.

Vu que je suis un théoricien des particules, la pandémie n’a pas vraiment affecté la facette ‘chercheur’ de ma vie. En effet, je n’ai par exemple pas d’expérience à surveiller. La tâche ardue était d’arriver à caser la recherche au milieu de toute le reste, ce qui a un impact indirect sur la qualité de vie. Pour dire la vérité, la partie des activités de recherche qui m’a vraiment manqué durant la pandémie, c’est le café avec les collègues. Ainsi que, comme discuté avec @mintrawa dans la version anglaise de ce post, les bières après le boulot. En effet, les projets les plus intéressants ont toujours démarré là où on ne les attendait pas... ;)

De façon anecdotique, même si mes activités de vulgarisation (sur Hive) se sont atténuées (c’est le moins que l’on puisse dire), je les ai remplacées par des activités dans les lycées et avec le grand public. Je ne citerai qu’un exemple récent : la fête de la science qui a eu lieu partout en France il y a quelques semaines. Et oui, difficile de vivre sans partager ce que l’on fait, comment on le fait, pourquoi on le fait et surtout pourquoi c’est le plus beau métier du monde (on pourrait critiquer un manque d'objectivité, que j'assume pleinement) !


Et maintenant, quid de Hive et STEMsocial?


C’est peut-être la question à un million d’euros du jour….

Bien qu’ayant découplé de la chaîne durant la pandémie, je n’ai pas cessé de suivre ce qui se passait avec le projet STEMsocial. Bien sûr, le niveau de mes interactions et de mon engagement a baissé (comme pour tout le reste). Mais j’ai toujours suivi les conversations sur notre serveur Discord, et je remercie très fortement nos curateurs super motivés (@gentleshaid, @carloserp-2000 et @iamphysical) qui ont permis au projet d’être toujours vivant aujourd’hui. Nous supportons ainsi du mieux que nous pouvons les auteurs des thématiques STEM sur Hive, en anglais mais aussi en espagnol (@stem-espanol), en français (@francostem) et via notre sous-communauté du Nigéria (@stemng).

Du côté personnel (j’ai promis que ce post allait être personnel), ce qui me manque le plus, c’est vraiment la curation, la lecture et l’engagement avec les auteurs. Ça c’était bien le fun ! C’est ainsi le premier truc que je me suis remis à faire depuis mon retour il y a quelques jours. Je suis ravi de voir que certains des auteurs que j’appréciais dans le passé sont toujours là. Bien sûr d’autres sont tombés dans un trou noir…

De façon plus pratique, j’aimerais redémarrer le développement de l’application STEMsocial (qui est dans un état de mort cérébrale). Mais sans vrai développeur pour aider, cette tâche me semble complexe. C'est ici que @bambukah viendra à notre rescousse très prochainement ! Merci à lui (et on vous en dira plus dans le prochain épisode).

Le sujet suivant sur ma liste STEMsocial concerne nos AMAs (ask me anything en anglais). On avait presque démarré cela avant le COVID… et puis le COVID est venu. Et pooouuufff, fini. Mais voilà, en espérant une présence plus constante sur la chaîne et un public qui est là, c’est quelque chose à garder à l’esprit. Toute aide organisationnelle est aussi la bienvenue.

Et en aparté, j’ai finalement tourné les scripts permettant de restituer les gains de curation aux délégateurs et à l’équipe (on renvoie 85% des gains; ne pas hésiter à déléguer si jamais), et nous avons coupé notre witness. Etre un witness Hive est quelque chose qui demande du temps, une ressource qu’aucun des membres de l’équipe n’a en ce moment. Bref, ce witness fut une belle aventure, qui si elle ne se termine pas se met au moins en pause. Encore merci à ceux qui nous ont soutenus !


Et maintenant ?


Je pense qu’il est finalement temps de clore ce post, qui est probablement trop long. Je me demande d’ailleurs s’il y aura des lecteurs qui le liront en entier.

Bref, j’espère tout bientôt me remettre à parler de science sur Hive, et vous partager des nouvelles de physique des particules et de cosmologie intéressantes (de mon point de vue au moins). Comme au bon vieux temps ! Je vais tenter d’écrire en anglais tous les lundis, et en français tous les jeudis. Est-ce que je tiendrai le coup ? Le futur nous le dira !

En parallèle, me revoilà pour STEMsocial et je vais tenter de m’impliquer dans les différents aspects mentionnés plus haut.

Sur ce, je vous dis donc à jeudi !

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